MA MAISON VIDE
J'ai retrouvé ma maison vide. Je ne sais pas depuis quand j'étais partie, mais c'était aujourd'hui. J'avais de nombreuses courses à faire, comme mes sœurs.
Heureusement, il faisait beau. J'aime quand il fait beau. Ça me met le baume au cœur et le cœur à l'ouvrage ; je ne sais pas pourquoi, c'est comme ça. Je n'avais pas de liste mais tout dans la tête. Je n'avais pas de carte géographique : mon sens de l'orientation est infaillible ; je crois que c'est héréditaire. Quand on sort de chez nous pourtant, le danger nous guette. Parfois il est invisible, des amies sont mortes récemment d'un mal mystérieux. On dit qu'elles se sont perdues. Je ne sais pas. Le danger se manifeste aussi de plus en plus souvent par la famine ; il devient difficile de se nourrir et de nourrir nos enfants. J'avais aujourd'hui un tas de magasins à visiter, dont les enseignes rivalisent de couleurs ; des rouges, des bleus, des jaunes ; des petites boutiques comme des grands magasins dans lesquels on ne sait pas où donner de la tête. J'avoue avoir un faible pour les parfumeries. Mais il faut aller de plus en plus loin. Avant, on avait tout à côté de chez nous. Je ne sais pas pourquoi c'est devenu comme ça. Je n'ai pas le temps ni l'envie d'y réfléchir ; il faut y aller, j'y vais. Je pense que j'ai bien travaillé. Je suis revenue chargée comme un baudet, les membres lourds et collants. Un calme inhabituel régnait autour de la maison. Je me suis pointée à la porte. Souvent il y a du monde, mais non… J'ai appelé : rien. C'est là que je l'ai vu fondre sur moi et que j'ai su que j'allais mourir…
Parce que c'était un frelon et que j'étais une abeille.